Nos #institutions sont vulnérables à des défaillances soudaines, catastrophiques, voire irréparables. Ne les croyez pas :
« Dans la plupart des contextes, les professionnel·les du climat et de la durabilité ne sont pas payé·es pour changer les choses importantes, iels sont payé·es pour protéger les choses importantes du changement.
« L'expertise en matière de climat et de développement durable est devenue une profession comme une autre. Elle propose principalement des plans à moindre coût pour des actions progressives mais socialement crédibles. En général, ces plans défendent les organisations contre les critiques et les pressions en s'engageant sérieusement à atteindre des objectifs importants mais lointains (comme « Net Zero d'ici 2050 »), associés à des mesures incrémentales et peu coûteuses à court terme. Les deux sont ensuite « triangulés » avec des arguments selon lesquels les petits pas d'aujourd'hui sont « en ligne » avec un avenir d'action audacieuse. Le principal résultat est l'affirmation que l'employeur du triangulateur « en fait assez ».
« La définition de l'expression « en faire assez » devient le champ de bataille critique avec les défenseurs et les régulateurs qui veulent plus d'action. Avec la triangulation, nous assistons au déploiement de solutions complémentaires destinées à préserver la valeur des approches lentes, des actifs et de l'expertise. L'accent est mis sur des éléments tels que les dons caritatifs, les notations ESG [critères environnementaux, sociaux et de gouvernance], les émissions climatiques opérationnelles (et les compensations carbone), les engagements en matière de développement durable dans le cadre de l'activité de la firme (de petites mesures qui rapportent), le comportement des employé·es (« N'oubliez pas de recycler vos tasses de café et de participer à la journée de plantation d'arbres ») et les messages (de l'écoblanchiment pur et simple aux déclarations vides de sens de soutien à la justice climatique).
« La promesse de la #triangulation - l'apparence d'un engagement sérieux, mais un programme d'action qui ne bouleverse pas les priorités de gestion et les centres de revenus existants - s'est avérée attrayante pour les dirigeant·es, pour des raisons compréhensibles : Si vous êtes un·e dirigeant·e qui n'a pas de compréhension particulière du bouleversement, l'embauche d'expert·es en triangulation vous permet de couvrir vos arrières sans inconvénient évident. Il s'agit d'une solution prête à l'emploi, qui vous permet de vous concentrer sur les modèles d'entreprise qui ont bien fonctionné jusqu'à présent. Elle limite l'exposition au fossé entre les approches lentes et les réalités rapides. Et cela fonctionne parfaitement, tant que votre horizon décisionnel est très proche, mesuré en rapports trimestriels, et n'est pas interrompu par des changements soudains.
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« La triangulation rend la plupart des institutions moins performantes en matière de stratégie. Elle rend l'expertise professionnelle acquise dans le cadre de ses programmes obsolète. Elle entrave la capacité à repérer les opportunités et les compétences nécessaires pour agir de manière disruptive afin de les saisir.
« Les stratégies triangulées protègent les organisations des pressions exercées pour qu'elles agissent maintenant, mais elles affaiblissent les capacités de changement de l'organisation. Tout ce qui mérite d'être discuté se trouve en dehors des limites du débat couramment acceptable dans la plupart des cercles professionnels, parce que chaque position triangulée et chaque bulle d'expertise créent les limites dont elles ont besoin pour rester sûres. Si vous comptez sur les conseils donnés à l'intérieur des limites triangulées pour essayer de comprendre ce qui se passe, vous externalisez votre acuité stratégique à des personnes dont la compétence principale est d'éviter la question ».
Alex Steffen (en): https://alexsteffen.substack.com/p/discontinuity-is-the-job